Jardin Clos du Peyronnet (privé)

© Yann Monel

Informations pratiques
Jardin Privé
Avenue Aristide Briand

Ultime témoin d’une époque

A un jet de pierre de l’Italie, tout près de la voie ferrée qui court dans une tranchée à quelques pas devant la maison, dominé par l’énorme corniche de la retombée du massif alpin, le Clos du Peyronnet est l’ultime témoin d’une époque. Son propriétaire, William Waterfield, est le dernier représentant des grands jardiniers anglais de Menton. D’une superficie de un demi-hectare, de forme grossièrement carrée, la propriété se présente comme un espace clos, fermé côté Sud par la villa et entourée de hauts murs de pierres sur les trois autres côtés.

La villa aux couleurs passées, noyée dans la végétation, se singularise par une longue galerie à colonnade dont une moitié est ornée par une magnifique et très ancienne glycine. L’autre moitié, convertie en terrasse, est un lieu de vie où on peut s’asseoir pour bavarder et prendre le thé. Au-dessus de cette galerie, sur la façade, en position légèrement excentrée est accroché un balcon qui ressemble à une loge de théâtre.

La propriété est achetée en 1912 par Derrick Waterfield, le grand-père de William, à madame Troubridge. La maison construite en 1897 possède son potager et son verger d’oliviers, de figuiers et de citronniers. Les grands palmiers Washingtonia filifera, Brahea armata, Phoenix canariensis et le vénérable Nolina qui accueillent le visiteur à l’entrée de la villa sont déjà plantés lors de l’acquisition. A la mort des grands-parents, les deux fils, Humphrey, l’oncle et Antony, le père de William, héritent de la propriété.

La villa est divisée en deux appartements. Après la guerre, Humphrey et Antony reviennent à Menton pour constater que les combats et les pillages n’ont épargné ni la maison, ni le jardin. Le bilan est lourd. Plutôt que de restaurer, Humphrey, architecte autodidacte et talentueux, redessine et remodèle le jardin. Il repense le plan et redéfinit des perspectives. La décennie 1950-1960 est décisive pour le Clos du Peyronnet. A partir d’un petit bassin existant, creusé en haut du jardin, il imagine un escalier d’eau, c’est-à-dire une succession de bassins de dimension identique, dénivelés les uns par rapport aux autres et séparés par les restanques. Plus bas, il fait creuser deux pièces d’eau rectangulaires, beaucoup plus grandes et également dénivelées entre elles. Entre les deux ensembles de bassins, il aménage une tonnelle posée sur des piliers de pierres servant à la fois de passage et de lieu de repos.

Du haut de la propriété, le regard rebondit sur chaque miroir d’eau qu’il entr’aperçoit plutôt qu’il ne voit, pour aller se perdre à travers une étroite fenêtre végétale dans l’immensité bleue de la Méditerranée. Afin d’avoir un autre regard sur ce jeu de miroirs, Humphrey Waterfield n’hésite pas à élargir considérablement l’escalier de pierres qui escalade les deux dernières restanques. Cette flaque de lumière sur cet espace minéralisé ocre accentue l’illusion de naturel de ces biefs successifs enveloppés d’une couronne herbeuse épaisse et sensuelle. L’association entre le jeu d’eau et le grand escalier est une référence implicite aux aménagements classiques des parcs des grands châteaux. William Waterfield devient définitivement mentonnais en 1976. Son objectif est de conserver le jardin en l’état afin de sauvegarder l’œuvre de Humphrey. Néanmoins il apporte sa propre touche car le lexicologue s’est fait jardinier. De ses voyages en Afrique du Sud, il rapporte la passion des bulbes et sa propre collection compte aujourd’hui plus de 300 taxons.

Le Clos du Peyronnet est aujourd’hui un lieu merveilleux où l’ordre n’exclut pas la fantaisie. Jardin saturé de parfums, de chants d’oiseaux et de sensualité, le Clos du Peyronnet hésite entre la luxuriance folle et l’austérité savamment calculée. Ultime singularité du Clos du Peyronnet parmi les grands jardins d’exception de Menton, son alimentation estivale en eau est encore aujourd’hui dépendante d’un collecteur construit sous le Premier Empire.

Durant l’été le Clos du Peyronnet devient une oasis et tout en travaillant William Waterfield entend le chant de l’eau remplissant la citerne comme l’entendaient déjà les mentonnais au XIXème siècle. Dieu merci, la tradition est sauve. So british !

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