La culture : c’est à vous !

« Artium civitas », Cité des Arts La devise, inscrite à l’entrée de l’Hôtel de Ville, traduit la vocation culturelle de Menton qui s’exprime dans la valorisation du patrimoine – monuments et jardins. Une vocation confirmée par l’attribution, en 1991, du label « Ville d’Art et d’Histoire » Plusieurs musées, une galerie d’art contemporain et un calendrier événementiel riche – le Festival de Musique, les Colloques « Penser notre temps », le Festival des jardins ...

Décadrages épisode 4 – Les soldats écossais

Intéressons-nous aux premiers pas de Jean Cocteau en dessin, à travers un aspect peu connu de sa carrière, celui du dessin de presse. Dès le collège, le jeune Jean Cocteau, peu intéressé par ses études, remplissait déjà les marges de ses cahiers de croquis démontrant un certain talent pour la caricature.

Quelques années plus tard, ce talent s’exprime dans les pages des revues littéraires dont ses débuts prometteurs de jeune poète lui ont ouvert les portes : il croque alors les personnalités du tout-Paris artistique, en particulier les légendaires acteurs et actrices de théâtre qu’il admire.

Lorsqu’éclate la Première Guerre mondiale, la mobilisation générale, les réquisitions puis l’offensive allemande des premiers mois mettent un coup de frein brutal à la vie artistique et culturelle parisienne. Parmi les nouvelles publications qui apparaissent alors pour combler le vide figure le journal Le Mot, fondé à l’automne 1914 par l’illustrateur Paul Iribe : il s’agit d’une revue littéraire et artistique, mais au ton très fortement marqué par l’esprit patriotique et antigermaniste qui domine l’époque.

Cocteau devient rapidement l’un des contributeurs principaux au journal grâce à ses articles, ses poèmes, mais aussi ses dessins. Il invitera également ses amis artistes tels que Raoul Dufy, André Lhote, Albert Gleizes ou le décorateur Léon Bakst à collaborer au Mot.

À la même époque, Cocteau, qui avait été exempté du service armé pour raisons de santé, décide de s’engager comme volontaire dans un convoi d’ambulances improvisé en soutien au dispositif de la Croix-Rouge pour aller apporter les premiers secours aux blessés sur le front. L’expédition, partie dans une espèce d’euphorie aventurière est rapidement confrontée à la terrible réalité du terrain.

S’il ne participe pas aux combats, Cocteau fait l’expérience des effroyables ravages de la guerre au travers des mutilés qu’il va secourir, et en sortira profondément bouleversé. Mais ces moments d’horreur sont entrecoupés de périodes d’attente, de camaraderie, parfois même de légèreté : l’ensemble de ces expériences, dans toute leur diversité, nourriront les contributions de Cocteau au Mot.

L’un des souvenirs les plus plaisants semble attaché aux soldats alliés stationnés près du front, et en particulier aux Écossais dont l’uniforme pittoresque, et surtout le kilt, semble beaucoup amuser Cocteau. Il publiera ainsi dans le Mot plusieurs vignettes humoristiques sur ce thème, dans le plus pur style du dessin de presse de l’époque. L’un de ces dessins en particulier eut les honneurs de la dernière de couverture du numéro du 13 février 1915 : on y voit deux solides soldats écossais en uniforme, accompagnés de la légende « De père en fils : — c’est un garçon qui n’a jamais quitté les jupes de son père ! » Le croquis original, réalisé à l’encre noire, sera imprimé en bichromie noire et rouge. Comme tous ses dessins pour Le Mot, Cocteau le signe « Jim », pseudonyme qu’il emprunte à son chien.

Le Mot connaîtra une carrière éphémère : après neuf mois de parution irrégulière, il s’éteint début juillet 1915 à son vingtième numéro. Cocteau, lui, continue de dessiner les soldats dont il partage le quotidien jusqu’à sa démobilisation à l’été 1916. Cette expérience de la guerre fournira par la suite la matière première de plusieurs œuvres majeures de l’artiste : deux ouvrages poétiques — Le Cap de Bonne-Espérance, dédié à son ami l’aviateur Roland Garros en 1919, et Le Discours du Grand Sommeil en 1925 — ainsi que l’un de ses romans les plus célèbres, Thomas l’Imposteur, publié en 1923, dans lequel il décrira toute l’horreur de son baptême du feu lors du bombardement de Reims.


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